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Photo du rédacteurAida Copra

Lumières et Ombres : la magie fragmentée de Joël Pommerat

Dernière mise à jour : 6 juil.

Le 09 mai 2024
Théâtre Porte Saint-Martin

La Réunification des deux Corées
Une création théâtrale de Joël Pommerat
Avec : Saadia Bentaïeb, Agnès Berthon, Yannick Choirat, Philippe Frécon, Ruth Olaizola, Marie Piemontese, Anne Rotger, David Sighicelli, Maxime Tshibangu
Scénographie et lumière : Éric SoyerAssistants à la mise en scène : Garance Rivoal, Lucia Trotta, Pierre-Yves Le BorgneDirection technique : CIE Emmanuel AbateDirection technique : CIE adjointe Thaïs Morel Direction technique : Théâtre de la Porte Saint-Martin Thibault Petit Régie Générale : Théâtre de la Porte Saint Martin Jean-François Breut Vidéo : Renaud Rubiano Accessoires : Thomas Ramon Costumes : Isabelle Deffin Habilleuse : Claire Lezer, Marie Caponi et Françoise Ody Perruques : Julie Poulain (2024) - Estelle Tolstoukine (2012) Son ; Philippe Perrin (2024) - François Leymarie, Grégoire Leymarie (2012) Musique originale : Antonin Leymarie 
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La première scène s'ouvre dans le noir complet, uniquement brisé par le son de pas résonnants. Une voix se fait entendre suggérant le commencement du spectacle. Une femme apparaît alors, avançant lentement vers le proscenium. À chaque pas, une lumière se concentre sur elle, s'éclaircissant progressivement puis s'estompant peu à peu. Lorsqu'elle atteint le devant de la scène, elle commence à parler, sa voix chargée d'émotion. Elle évoque son divorce, dépeignant avec amertume un amour qui n'existe plus dans son mariage.

La deuxième scène présente les personnages assis sur des chaises alignées en une ligne droite. La discussion s'ouvre avec la conversation de deux femmes en couple. Leur histoire, bien que triste, ne dévoile ni son véritable commencement ni sa conclusion, car l'ensemble du spectacle est constitué de fragments. Ces morceaux épars, une fois réunis, offrent un panorama saisissant de la nature humaine, de ses passions, de ses peurs et de ses hésitations. En un mot, ce spectacle illustre la vie humaine, guidée par des sentiments profonds tels que l'amour et la passion.

Au début, nous sommes en quête du personnage principal et de l'histoire centrale. Nous essayons de comprendre si le début d'une histoire fait une pause pour laisser place à une intra-scène, avant de revenir à la trame principale. Ces intra-scènes sont des microcosmes, reliés entre eux par un fil conducteur unique : l'amour. Cependant, l'amour, bien que semblant omniprésent, n'est qu'une nuance parmi toutes celles qui composent la pièce. En l'absence de personnages principaux ou d'une histoire centrale définie, on peut se demander où se situe l'intrigue. Pourtant, le génie de Joël Pommerat réside dans sa capacité à intégrer l'intrigue dans chaque intra-scène, faisant de chacune une histoire complète avec ses propres mécanismes et ses propres lois.

Les scènes oscillent habilement entre le rire et le tragique, créant une balance impressionnante qui permet au spectacle de rester toujours fidèle à son idée directrice : une mosaïque d’émotions minutieusement élaborée et analysée. Joël Pommerat ne se contente pas de figurer divers sentiments, il nous plonge également dans un effet Rashōmon, illustrant comment un même événement peut être perçu différemment selon les perspectives des individus impliqués. Cette approche ajoute une profondeur supplémentaire, révélant la complexité et la subjectivité de l'expérience humaine. En entrelaçant ces diverses interprétations, le spectacle offre une réflexion riche et nuancée sur la nature des émotions et des relations humaines.

Et tout cela se déroule dans un espace apparemment simple durant la première partie du spectacle. La mise en scène repose essentiellement sur la lumière, qui joue un rôle crucial en accentuant les émotions, les états d'âme, les mouvements et les gestes des personnages. Cette simplicité n'est qu'apparente, car les effets de lumière sont savamment orchestrés pour créer des espaces distincts et offrir différentes perspectives sur une même scène.

Dans ce monde souvent plongé dans l'obscurité, certaines scènes émergent comme des étoiles filantes, éphémères mais lumineuses. L'une de ces scènes se déroule dans un Luna Park, avec des auto-tamponneuses qui se croisent et se heurtent dans un ballet chaotique mais captivant. Cette scène se distingue non seulement par son contraste visuel, mais aussi par sa corrélation avec l'un des personnages récurrents, qui apparaît sporadiquement, chantant et vêtu d'un pantalon pattes d’eph scintillant de paillettes, à la manière d’Elvis Presley.

Ce personnage, avec son allure flamboyante et ses performances musicales, ajoute une couche supplémentaire à l’ensemble du spectacle. Il incarne à la fois l'évasion et la désillusion, soulignant les thèmes de l'amour et des aspirations souvent inassouvies. À travers ces éléments visuels et sonores, Joël Pommerat crée un univers où chaque détail, chaque nuance de lumière, contribue à une exploration profonde et nuancée de la vie humaine.

À la fin du spectacle, un concert impressionnant prend place, agissant comme un hymne à la vie. Ce final réunit les émotions, les expériences et les perspectives diverses présentées tout au long de la pièce, offrant un message puissant et universel de résilience et de passion.

Aida Copra

© LRDDC

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