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Le Musée des Marionnettes de Porto : un monde qui ne dort jamais


En 2013, pour ses vingt-cinq ans, la compagnie a réalisé le rêve de son fondateur : ouvrir un musée dédié à ses créations. Et c’est là que commence véritablement la magie. Je dis bien commence, parce que même si l’on se trouve dans un lieu où les marionnettes sont exposées comme des objets de mémoire — des traces, des héritages —, pour nous, visiteurs, c’est l’entrée dans un monde encore vivant.


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Lorsque l’on pense à la tradition artistique portugaise, c’est souvent le fado qui s’impose : un chant qui traverse l’histoire du pays et nous plonge dans cette saudade si caractéristique, portée par une voix et une guitare capables de toucher même ceux qui ne comprennent pas la langue.

Lors d’une semaine passée à Porto, j’ai eu envie d’explorer un autre versant de la scène portugaise. Et, à ma surprise, la première chose sur laquelle je suis tombée fut… la marionnette. Rien à voir avec l’imaginaire que j’avais construit, influencée sans doute par le fado et par l’idée d’un théâtre proche de la danse ou de chants mélancoliques.


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Je découvre d’abord l’existence d’un personnage traditionnel : Roberto, une marionnette à gaine que l’on peut rapprocher de grandes figures européennes comme Punch en Angleterre, Pulcinella en Italie, Guignol en France ou Kasperl en Allemagne. Né dans les rues et les foires du XVIIIᵉ siècle, le Teatro Dom Roberto était joué dans de petites cabanes colorées, au cœur d’un théâtre populaire vivant.

Mais malgré ces parentés européennes, Roberto reste profondément portugais, nourri du langage, des coutumes et de l’humour du pays. Son débit rapide, sa voix artificielle et ses gestes exagérés transforment des situations très simples en petites scènes satiriques. Le marionnettiste, discret et presque invisible, structure toute la dynamique du jeu, donnant à Roberto une énergie presque autonome.





Pour en savoir plus, je me suis donc rendue au Musée des Marionnettes de Porto.




Je pensais y trouver quelques pièces artisanales ou des marionnettes pour enfants, rien de très différent de ce que l’on connaît ailleurs. Comme souvent avant d’aller voir un spectacle, j’avais volontairement évité de trop me renseigner, pour que la découverte reste entière, presque « pure », libérée de toute anticipation.

Et c’est là que j’ai vu Roberto : son visage rouge, son expression de bagarreur. C’est avec ce personnage que la compagnie Teatro de Marionetas do Porto a débuté son parcours en 1988, sous l’impulsion de João Paulo Seara Cardoso (1956-2010), élève du maître marionnettiste António Dias, dernier représentant des marionnettistes itinérants des années 1980.


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Je n’ai pas vu le spectacle lui-même, mais une vitrine en reconstitue l’une des scènes. On y voit quatre marionnettes de Roberto, aux expressions et costumes variés, une marionnette incarnant la Mort, un taureau. Le décor, en bois, comporte des ouvertures par lesquelles passaient les mains des marionnettistes, et l’avant-scène est délimitée par un drap coloré qui rappelle les tissus des fêtes de campagne. Cette installation reproduit la scène du spectacle Teatro Dom Roberto de 1988, un morceau d’histoire conservé au musée.

En 2013, pour ses vingt-cinq ans, la compagnie a réalisé le rêve de son fondateur : ouvrir un musée dédié à ses créations. Et c’est là que commence véritablement la magie. Je dis bien commence, parce que même si l’on se trouve dans un lieu où les marionnettes sont exposées comme des objets de mémoire — des traces, des héritages —, pour nous, visiteurs, c’est l’entrée dans un monde encore vivant. On s’y promène avec une curiosité enfantine, entourés d’objets qui semblent ne jamais s’être totalement arrêtés. Ils restent là, prêts à reprendre vie, prêts à parler, même s’il n’y a personne derrière eux pour les manipuler.


Les marionnettes créées pour leurs spectacles sont fascinantes. Elles diffèrent par leurs formes, leurs tailles, leurs matières, leurs costumes et par les multiples techniques de manipulation. Une telle diversité laisse deviner un répertoire d’une richesse exceptionnelle, confirmé par les titres et les univers explorés par la compagnie. On y croise notamment des mises en scène d’auteurs tels que Eugène Ionesco, Samuel Beckett, William Shakespeare, Heiner Müller, Marguerite Duras, entre autres.




En plus de cet univers immobile, le musée réserve un petit espace avec deux chaises, dédié à la projection d’extraits de leurs spectacles. Je n’ai pas pu m’empêcher de tout regarder : après avoir vu les marionnettes figées dans les vitrines, j’avais envie de découvrir comment chacune d’elles prenait vie sur scène. Et malgré le plaisir immense de les voir s’animer à l’écran, je suis sortie avec une légère déception : celle de ne pas avoir eu la chance d’assister à l’un de leurs spectacles en vrai.

Si jamais vous passez par Porto, ne manquez pas d’entrer dans ce petit monde magique, où l’on croise le regard d’objets qui ne sont, en réalité, tout sauf inanimés.


Pour en savoir plus sur la compagnie Teatro de Marionetas do Porto, n’hésitez pas à visiter leur site et à suivre leur actualité

Aida Copra

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